"O Satan, prends pitié de ma longue misère!

O toi, le plus savant et le plus beau des Anges,
Dieu trahi par le sort et privé de louanges,

O Prince de l'exil, à qui l'on a fait tort,
Et qui, vaincu, toujours te redresses plus fort,

Toi qui sais tout, grand roi des choses souterraines,
Guérisseur familier des angoisses humaines,

O Satan, prends pitié de ma longue misère!"

J’allais encore devoir remettre ça… Après avoir activement participé à la chute de Setsuri Hazu, le ninja le plus puissant qu’il ait jamais existé, après avoir tué un juunin trop curieux, voila qu’une jeune chuunin venait une nouvelle fois se placer involontairement sous ma lame.
J’avais profité que la majorité des ninjas partent en mission pour rejoindre un informateur de la lune rouge. Ce jour là j’avais été particulièrement anxieuse à l’idée que la lune rouge abritait un nouveau chef. J’étais la plus ancienne des membres de l’akatsuki. Ayant connu Saber Milena, puis Pain avant qu’elle ne soit reprise par Kisame, voila qu’un nouveau débarquait sans prévenir. Il me fallait à tout prix des informations… et ma précipitation m’avait fait oublier la prudence. Quand j’eus terminé d’échanger les situations de Kumo avec l’informateur, je balayai les environs de ma technique de senseur et j’y découvris une présence qui n’aurait jamais du être là… Avant que je n’eus le temps de le prendre sur le fait, il prit la poudre d’escampette et j’en déduisis qu’il s’agissait là d’un ninja. Un citoyen n’aurait pas pu s’en aller aussi rapidement… J’utilisais donc les jours qui suivirent à balayer le village de ma technique, tâchant de reconnaître la présence. Enfin, quand je découvris de qui il s’agissait, je mis mon plan à l’action.
Isako Shibata est une jeune chuunin active du village. Une perte qui serait regrettable pour Kumo… Mais ma couverture passait avant tout. Heureusement, sa nature prudente l’avait empêché de dire ce qu’elle avait vu, attendant sans doute d’être certaine de ce qu’elle avait pu comprendre sur le peu d’informations qu’elle détenait… Je lui envoyai donc une missive la conviant à un entrainement comme il était régulier que les juunins le fassent avec des grades moins élevés. Elle accepta sans problème et je lui donnai le lieu de rendez-vous dans les montagnes, un jour où l’orage grondait. Peu de personnes sortiraient et là où nous devions aller, les passages étaient peu fréquents… Et si nous faisions trop de bruits, le tonnerre dissimulerait ces excès. Tout avait été prévu… Je l’avais suivi dès son départ, vérifiant qu’elle n’informait personne de ses projets et heureusement, son caractère indépendant me sauva la dure tâche de devoir éliminer les personnes à qui elle aurait parlé. De ce fait, elle atteignit sans difficulté la clairière bordé par la falaise d’un coté où une herbe tendre et humide en tapissait le sol.

« La pauvre petite…
Crois-moi, je le fais de façon involontaire.
Pour un membre de l’akatsuki, tu m’étonnes…
Je ne les sers que pour l’objectif… Mes méthodes ne regardent que moi.
Et ça se dit criminelle de rang S !
Ca, c’est toi qui me le rappelles sans arrêt… »

Elle me tournait le dos, inconsciente de ce qui allait se passer. J’aurais pu la tuer à ce moment là mais le faire lâchement n’était pas dans mes habitudes… Je fis donc quelques pas vers elle, le bruit attirant son attention. Elle me salua poliment mais je vis une certaine tension dans ses membres qui montraient qu’elle se posait toujours des questions sur moi. Elle esquissa tout de même un sourire amical que je lui rendis teinté de tristesse. Je n’avais jamais aimé tuer qui que ce soit mais malheureusement, j’avais une couverture à conserver. Je posai donc doucement une main sur sa tête, la surplombant de quelques centimètres de ma haute taille.

Battons-nous loyalement, Isako-chan. Lui dis-je gentiment.

La lâchant, je reculai de l’autre coté du terrain et sortis mon épée à la lame imposante. La tendant devant moi, le métal se disloqua en centaine de petites lames qui fusèrent alors vers Isako de manière aléatoire. Je vis à son regard qu’elle venait enfin de comprendre que ce n’était plus un entrainement mais un combat mortel… Mais par respect, je voulais ne pas faire une victoire trop écrasante. J’y allais donc en douceur bien que j’étais certaine qu’à son niveau elle n’arriverait jamais à esquiver tous mes projectiles. Une fois blessée, ce serait déjà la fin pour elle. J’avais moins de scrupule à achever quelqu’un qui souffrait…
L’œil peinait à suivre les lames minuscules qui fonçaient vers moi. Je tenais toujours la garde de mon arme, tendue devant moi comme un dernier salut.

Je suis navrée, Isako. Lâchais-je tout simplement au moment où elles allaient l’atteindre. Terriblement Navrée.

"Tout cela ne vaut pas le terrible prodige
De ta salive qui mord,
Qui plonge dans l'oubli mon âme sans remord,
Et, charriant le vertige,
La roule défaillante aux rives de la mort !"

Elle était tombée. Peut-être plus facilement que je ne l’aurais cru mais elle était tombée. D’un autre coté, sa résistance était admirable car elle arrivait toujours à me regarder dans les yeux, se tenant plus ou moins accroupi en compressant sa blessure, tentant vainement de juguler le flot écarlate qui coulait de celle-ci. Son regard en disait long sur ce qu’elle pensait… J’y voyais un mélange d’incompréhension, de colère et de désespoir. A cause de moi, sa vie allait prendre fin ce jour-même alors qu’elle venait tout juste de la commencer. Elle comprenait aussi que j’étais une traitresse à sa patrie chérie, elle voyait que tout n’était pas blanc dans la vie. Mais que tout n’était pas noir non plus… Seulement, elle ne serait plus de ce monde pour en admirer les autres teintes et pour cela, j’étais sincèrement navrée. Après tout, j’avais horreur de prendre des vies innocentes… Je me demandais même si elle avait déjà tué quelqu’un. Mais au moins elle ne mourrait pas sans savoir… Elle ne ressentirait pas la deception d’avoir été poignardée par l’un de ses amis puisqu’elle j’avais avoué sans la dire ma trahison. Si je devais mourir, j’espérais fortement que ce serait en comprenant pourquoi. Il n’y avait rien de pire que l’ignorance…

Ce ne sera pas impuni…

A sa dernière phrase, j’esquissai un léger sourire. Oui, évidemment que ce ne serait pas impuni et que tôt ou tard mes fautes me rattraperaient. Mais en tant que criminelle, nunkenin et membre de l’akatsuki, j’avais suffisamment réfléchi aux risques que j’encourais en persistant dans ma voix malgré les différences qu’elles représentaient avec celle de la loi. De ce fait, sa phrase ne signifiait rien pour moi si ce n’était une piètre tentative de me faire retourner à ce qu’elle appelait la raison.
Je sortis donc mon arme et me dirigeai vers elle, baissant mon regard sur son visage ensanglanté et la flaque rouge qui s’étalait en corolle sous son corps. Les projectiles minuscules se regroupèrent au bout de la garde de mon arme, formant une très longue lame fine qui la tuerait d’un coup sans trop abimer son corps. Je respectais un minimum la mort de mes ennemis après tout.
M’inclinant légèrement devant elle, je levai mon arme sans regarder son expression angoissée et la transpercer de part en part sans être bloquée par les os et les chaires que je sectionnai.

« Quel gâchis… Elle aurait pu devenir une grande kunoishi.
Il est des sacrifices nécessaires à l’accomplissement d’un nouveau monde. Elle ne sera pas morte pour rien.
Honnêtement ce n’était qu’une sale fouineuse, elle n’a eut que ce qu’elle méritait.
Un peu de respect, Viladra…
Je n’ai de respect que pour les gens forts. »

Ignorant ses sarcasmes, je m’agenouillai sur le sol et posai une mère à terre. La roche grondant, du métal en fusion sortit de cette dernière, entourant le cadavre et l’entourant dans une gangue rougeoyante. La chaleur commença à faire fondre lentement sa chaire et j’attendis jusqu’à ce qu’il n’en reste qu’une poudre d’os séchés que je répandis dans le vent. Si la réincarnation existait, j’espérai qu’elle trouverait une nouvelle vie plus longue et plus radieuse que celle-ci.
Me redressant lentement, je fis tournoyer ma lame dans les airs pour en ôter le sang et la rengainai sous sa forme originelle dans le même mouvement. Plaçant le fourreau à mon bassin, je sentais son poids contre mon dos et ce dernier me paraissait bien plus lourd maintenant qu’elle s’était à nouveau gorgée de sang. Mon quotidien paisible à Kumo touchait à sa fin sous les rayons de la lune rouge qui réaparassait…

Repose en paix, Isako-chan. Murmurais-je une dernière fois avant de prendre le chemin du retour.